Laboratoire du courant
anarcho-droitier
lieu tenu secret
vendredi 8h14
Léandre et Gros Bébert pénètrent
dans une pièce blanche bardée d'appareils électroniques. En son
centre trône une cage en verre. A l'intérieur un homme somnole.
Jean-Paul, en blouse blanche et charlotte sur la tête, se tient dans
l'angle de la salle, compulsant des notes sur son portable.
Jean-Paul relevant la tête :
ah ! Salut Camarades ! Enfilez vos tenues et
rejoignez-moi ! Vous allez m'aider pour la phase 2 de
l'expérience.
Léandre : c'est quoi
l'expérience ?
Gros Bébert : c'est obligé
la charlotte ?
Léandre : c'était quoi la
phase 1 ?
Gros Bébert : sérieux,
c'est vraiment obligé la charlotte, j'suis chauve !
Jean-Paul : nous
travaillons ici, vous le savez, sur les moyens de communication
politique envers les masses. Quel est le meilleur message à
appliquer pour que la classe ouvrière rejoigne notre lutte
émancipatrice et écosocialiste ? J'ai testé sur le patient
que vous voyez ici divers discours qui me semblent les plus
objectivement clairs et fédérateurs. J'ai commencé par lui
expliquer, avec des mots simples, la baisse tendancielle du taux de
profil. Le patient semblait m'écouter car il hochait la tête
poliment, puis il s'est mis à pianoter sur son smartphone :
échec.
Gros Bébert : la blouse
blanche est pas à ma taille, c'est pas grave, j'vais garder mon
Harrington.
Jean-Paul : j'ai donc
poursuis sur un ton un peu plus sportif en lui expliquant le système
des tendances au NPA. Je me disais que cette saine compétition
démocratique émoustillerait son intérêt. Là encore, passé
trente secondes, il a ouvert L’Équipe :
échec.
Léandre :
on peut fumer ici ?
Jean-Paul :
non !
J'ai même essayer l'humour comme le préconisaient les fondateurs de
ce blog. Je lui ai fait une blague qui faisait fureur au dernier
congrès de Lutte Ouvrière. J'vais vous la dire, tenez-vous bien. Il
pouffe.
Monsieur et Madame Gakautsky ont un fils, comment s'appelle-t-il ?
Hein ? Hein ? Comment il s'appelle ?
Gros
Bébert :
Arlette ?
Léandre :
Kevin ?
Jean-Paul :
mais non ! Réné ! Parce que Réné Gakautsky ! Il
éclate de rire et se tape sur les cuisses.
Léandre et Gros
Bébert : …
Jean-Paul :
« le renégat Kautsky », la brochure de Lénine en 1918 !
Léandre
poliment :
aaaah !... et le patient n'a pas ri ?
Jean-Paul :
non, j'y comprend rien : échec !
Gros Bébert
ironique :
en effet c'est curieux !
Jean-Paul :
n'est-ce pas ? C'est pour ça qu'on passe à la phase 2 !
Camarades, le patient est à vous !
Les
deux compères se rapprochent de la cage en verre qu'ils tapotent
doucement. Le patient se réveillent et leur fait un sourire amical.
Léandre :
bon, mon p'tit père, on va pas y aller par quatre chemins, la
semaine prochaine y a une manif pour les cheminots et les services
publiques, tu dois en être...
Gros Bébert :
attend Léandre, regarde un peu ce qu'il porte ce bouffon, un maillot
de l'équipe de France de foot !!! Ah ça me dégoûte, un
supporter !
Léandre :
t'as pas honte d’arborer des symboles nationalistes ?
Le patient :
ben moi j'aime bien le foot …
Gros Bébert :
avec tout le pognon dépensé
dans le foot on pourrait abolir la faim dans le monde. Tu t'en fout
des enfants qui meurent ? Gros Beauf !
Léandre : putain mais
mec ! La coupe du Monde en Russie ! Ça cautionne une
dictature ! Poutine tue des journalistes, ça te choque pas ?!
T'as rien dans le crâne ou quoi ?
Le patient : c'est juste
l'occasion de passer un bon moment avec mes copains. Pour la finale,
j'ai prévu de me déguiser en Astérix et mon pote, lui, il sera en
…
Gros Bébert : et voilà,
ça pense qu'à faire la fête, picoler et manger du Nutella pendant
que Macron va supprimer la Sécu! Pays de merde ! Les français
sont des veaux !
Léandre : du pain et des
jeux ! C'est le pathétique cirque
médiatico-hystéro-nationalo-financier (sic). La bourgeoisie a tout
compris. Et vous, vous êtes tout juste bon à beugler comme des
décérébrés devant la tv et des millionnaires ahuris et des
pseudos matchs truqués organisés et commentés par des blaireaux
mi-racistes, mi-réacs tout juste bon à nettoyer mes chiottes (sic).
Gros Bébert soudain plus
amical : bon alors ? Tu viens à notre manif la semaine
prochaine ?
Le patient : euh... j'vais
y réfléchir. Faut que j'y aille ! Au revoir messieurs !
Il sort de la cage puis de la pièce.
Léandre :
on s'est pris un vent, non ?
Qu'est-ce qu'on a dit de mal ?
Jean-Paul :
vous voyez ? C'est
in-com-pré-hen-sible !
Gros Bébert :
j'comprend pas, tous nos arguments étaient justes ! C'est les
gens qui sont cons ?
Jean-Paul :
courage camarades ! Poursuivons les recherches, un jour
peut-être on trouvera...
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