Et c'est valable pour toi aussi
branleuse !
Les facs sont évacuées par les flics
les unes après les autres. La phase suivante, pour les présidents
d'université est de montrer aux médias dans quel état déplorable
les étudiants et les étudiantes ont laissé les lieux afin de
décrédibiliser leur lutte. En découvrant le souk que ça peut être
à Tolbiac ou au Mirail, on peut dire que la manœuvre leur est
souvent facilité.
Alors oui, les dégâts chiffrés sont
très certainement exagérés par les présidences soucieuses de se
poser en victime ; alors oui, les CRS ont certainement pas mis
les patins avant d'entrer dans les amphis ; alors oui le départ
précipité des étudiants ne leur a pas permis de terminer le
ménage ; mais quand même... c'est-quoi-ce-putain-de-boxon dans
les facs ?
On ne voit jamais d'usine occupée
transformée en déchetterie par leurs propres ouvriers en lutte,
peut-être parce que ceux-ci ont terminé leur crise d'adolescence.
Pour leur défense, les étudiants expliquent qu'ils ont « bien redécorés les murs de peintures de textes et d'illustrations »...
Alors, les grugrus regardez bien les images ci-dessous : à
gauche voici un mur redécoré, et ça a de la gueule en effet ;
à droite voici un mur salopé. Prenez tout le temps qu'il vous
faudra pour bien saisir les nuances.
Pourquoi donc donner des arguments au
camp d'en face ? On sait pertinemment que la moindre canette
abandonnée, le moindre graffiti sera exploité pour dévaloriser la
lutte des étudiants et occulter leurs revendications au profit d'une
condamnation larmoyante des « dégradations ». Qu'est-ce
que c'est que cette définition d'une fac ouverte où on peut chier
sur les murs ? Où des branleurs qui vivent chez papa-maman
trouvent enfin un lieu pour s'arsouiller la gueule ?
Ça parle charge mentale et
déconstruction des genres et c'est pas foutu de passer la
serpillière ? On nous rétorquera que c'est la liberté de
chacun, que le désordre c'est la vie, qu'on est pas dans une
caserne, etc... bullshit ! Le problème est similaire aux blacks
blocs. Ceux-ci s'incrustent dans une manif pour imposer leurs
méthodes de lutte et en excluent de fait ceux qui ne veulent pas les
assumer, notamment les familles. Quelques phacochères s'incrustent
dans les facs, imposent leurs mode de vie et en excluent les
étudiants et étudiantes qui n'ont pas envie de vivre dans la crasse
et avoir à gérer des poivrots. Alors qu'il serait aussi simple pour
les premiers d'aller péter des vitrines à l'opposé des manifs, et
pour les seconds d'aller squatter un entrepôt ou des bureaux vides.
Quels sont nos conseils ?
Il se trouve que l'auteur de ces lignes
a participé jadis à l'occupation d'une fac de province, lors de la
glorieuse lutte contre le CPE en 2006. Après une semaine de picoles,
de dégradations et de vols, l'assemblée générale étudiante vota
l'interdiction pure et simple de toute consommation d'alcools et de
drogues à l’intérieur de l'université. Même la loi Evin sur le
tabac devait être respectée, on fumait à l’extérieur des
bâtiments. Punks à chiens, clodos et personnes instables
psychologiquement n'étaient pas acceptés. Certains ont chouiné que
la fac devait être ouverte à tous et que c'est plus sympa de
discuter avec une bière et un p'tit pétard. Si le règlement les
démotivait, c'est que ce n'était pas les militants les plus
intéressants (et les plus motivés).
Eh ben vous savez quoi ? On ne
passait pas pour des guignols même auprès de nos adversaires, et la
fac fut une de celles occupées le plus longtemps (six semaines
d'affilé). Ne pas avoir de gens bourrés à gérer tous les soirs,
c'est vachement reposant et ça laisse du temps pour faire du ménage.
Et le ménage aide à l'introspection, essayez vous verrez. Une heure
de ménage vous procurera une dose d'endorphine similaire à une
activité sportive, vous offrant une sensation de bien-être voir
même d'euphorie. Ceci vous mettra dans d'excellentes conditions pour
élaborer plans de mobilisations, discours et argumentaires en faveur
de vos luttes.
Ainsi une fac occupée et ouverte n'est
pas nécessairement synonyme de vie bordélique. Un étudiant choqué
par les dégradations n'est pas nécessairement un affreux
réactionnaire. Aussi, on prend soin de son lieu de travail et on
l'entretien durant tout le temps où on en a la responsabilité,
c'est à dire durant les occupations. Il n'est pas interdit bien sûr
de faire la fête et de se déchirer la tête si on en a envie, mais
dans ce cas, on rentre chez soi pour le faire, et on revient une fois
qu'on a décuité et qu'on a pris une douche. Chacun doit se sentir à
l'aise et se reconnaître dans la mobilisation. L'objectif, en manif
comme en occupation, n'est-il pas de rassembler le plus de monde
possible et de ne pas offrir de failles à nos adversaires ?
Ainsi se gagne la bataille de l'opinion.
Alors au boulot et n'oubliez pas les
chiottes.
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