dimanche 14 avril 2013

Quand c'est No, c'est No !

No (que l'on peut traduire en français par « non », ne soyez pas surpris, nous sommes polyglottes) est un film chilien de Pablo Larrain qui reconstitue la campagne référendaire qui ''chassa'' Pinochet du pouvoir en 1988.

Sous la pression internationale, le régime fasciste chilien (appelons un chat un chat), en place depuis le coup d’État militaire de 1973 (soit 15 ans, nous sommes aussi des bêtes en calcul mental) dut instaurer un référendum pour la reconduite pour sept ans au pouvoir du meilleur ami de Margaret Thatcher (hommage posthume à The Bitch). Simple formalité pensent les cadres du régime, les ''homosexuels communistes'' (comprenez les opposants au régime) n'auront droit qu'à quinze minutes d'antenne par jour à une heure tardive durant la campagne.

Les membres de la « Concertation des partis pour la démocratie » qui fait campagne pour le non au référendum, partent eux-mêmes vaincus d'avance. « On profite de l'espace que le pouvoir a dû céder pour informer le peuple, pour le repolitiser,... mais le vote est joué d'avance, on travaille sur du long terme... ». Il faut d'ailleurs commencer par convaincre les électeurs de se déplacer jusqu'aux urnes, quinze ans de répressions fascistes ont quelque peu refroidi la témérité du peuple chilien.

Certains responsables de l'opposition vont alors faire appel à des publicitaires pour organiser leur communication. Des jeunes loups du marketing vont relever le défi. Comment rattraper le retard sur les pronostiques favorables au gouvernement ? Comment redonner espoir aux partisans du non ? Comment séduire les résignés ? Les publicitaires ont une idée géniale, ils vont associer la campagne du ''non'' à ce qui est le plus vendeur, à savoir la joie. Les gens cool sont pour le non, l'avenir riant passe par le non, le non rendra la joie à ce pays sclérosé par quinze ans de libéral-fascisme.

Pablo Larrain se fait plaisir en nous montrant la première confrontation entre le jeune publicitaire qui se rend au travail en skateboard, René Saaveda, et la veille garde anti-Pinochet. Non, non et non, disent ces derniers, la lutte pour la démocratie ce n'est pas drôle. On ne conscientise pas les gens en faisant des blagues. La politique c'est sérieux.

Ces personnages nous rappellent nombre de militants actuels, de ceux qui chantent l'Internationale sourcils froncés et gueule en biais. De ceux pour qui un nez rouge ou un prout n'ont pas leur place dans un discours politique. Ceux qui confondent ''sérieux'' et ''triste''.

Heureusement pour l'issue du vote, les réserves des grincheux ne seront pas retenues. Les émissions de l'opposition seront vite très populaires, tandis que la communication de la junte s'enfonce dans la ringardise et l'agressivité. Résultat : une participation massive au référendum et 55,99 % de non à Pinochet.



Le film de Pablo Larrain est unanimement salué pour ses qualités cinématographiques, bien que l'image soit filmée en Lumatic afin d'insérer des archives d'époques sans contraste, ce qui donne un gain VHS assez dégueulasse. Les critiques se portent sur le fond de l'histoire. No est pour beaucoup l'illustration de l'époque où les équipes de com' prennent le pouvoir dans le discours politique. La forme primerait désormais sur le fond, et la campagne référendaire de 1988 serait le prélude du Chili contemporain devenu un gigantesque supermarché.

Pourtant « la forme c'est du fond qui remonte à la surface », disait Victor Hugo. Et le fond est présent dans les spots des démocrates, on y parle de la censure, des disparitions d'opposants, de la torture, des 40% de la population qui vivent dans la misère, mais ces dénonciations n'ont pas pour but de se flageller ni de s'enfermer dans une commémoration sans fin des martyres, les meilleurs d'entre nous etc... On ne rassemble pas son auditoire en le désespérant.

Là où le film pêche, à notre avis, c'est que lui-même est un film publicitaire qui vend de la joie. Les gentils démocrates gagnent à la fin sans user de violence et les méchants dictateurs perdent. Pinochet est pourtant resté le chef des armées pendant sept ans et s'est octroyé une immunité parlementaire. Son successeur est un démocrate-chrétien qui a soutenu le putsch contre Allende et le libéralisme installé par la dictature n'a pas été remis en cause.

Répétons le encore : « la forme, c'est du fond qui remonte à la surface », ou pour le dire autrement, un programme émancipateur doit avoir un discours émancipé. Camarades gauchistes, vous voulez être convaincant oui ou merde ? No peut peut-être vous apporter quelques réponses.


9 commentaires:

Tonio a dit…

Pas tout à fait d'accord camarades. Le film est beaucoup plus fin que ça. Il commence et finit par la même séquence : des publicitaires qui, avant et après la dictature tiennent le même discours pour vendre leur merdre.

Un des acteurs du film est très lucide en interview : le Non a gagné par les méthodes mêmes du libéralisme. Ce référendum s'il a fait tomber Pinochet était un piège pour la gauche : le refuser et garder Pinochet, ou l'accepter et avaliser le libéralisme.

En gros, faire tomber Pinochet n'a pas fondamentalement changé le système hérité de la dictature (que les mouvements sociaux actuels chiliens contestent vigoureusement depuis 3 ans).

"Tout changer pour que rien en change", comme dans le Guépard...

anarcho-gauchiste a dit…

En fait les masses chiliennes ne sont pas vraiment concernées, les vrais acteurs de la politique ce sont les publicitaires...
A quand la même chose en France, une hagiographie de Séguéla pour sa "force tranquille" de 81?

JLM a dit…

Le principal souci de l’état-major solférinien est que la colère qui résulte de la situation n’aille pas de notre côté, vers le Front de Gauche. Leur préoccupation rejoint celle de l’extrême-droite qui reste collée par son affaire de compte Cahuzac ouvert par le bras droit financier de madame Le Pen. L’extrême-droite sait que le Front de Gauche gagne du terrain à la base. Et d’abord parce que la force rassemblée dans la campagne électorale ne s’est pas débandée comme c’est le cas pour tous les autres groupes. La ferveur des rassemblements à Martigues et à Montpellier est une démonstration de force et de dynamique ! L’extrême-droite n’est plus capable de cela à cette heure. Force électorale ? Oui sans doute. Mais une force diffuse et diluée, sans consistance opérationnelle. En atteste le renouveau d’activité des groupuscules d’extrême-droite qui sont contraints d’occuper le terrain déserté par le nouveau FN « dédiabolisé ». Marine Le Pen s’est fait prendre le leadership politique par les organisateurs des manifestations contre « le mariage pour tous ». Faut-il rappeler que madame Le Pen ne participe pas à ces manifestations ? Et que son bras droit, monsieur Philippot, les tient à distance ? Au contraire dans notre camp il n’y pas de frontières avec les milieux politico-sociaux qui nous portent et que nous soutenons ! C’est ce qu’ont montré toutes les manifestations syndicales de ces derniers temps, et l’accueil que j’ai reçu au congrès de la CGT. Mais d’un point de vue de classe, comme dirait Cahuzac, l’alerte est donnée. Pour la droite et l’extrême-droite lepéniste, il ne faut pas laisser la colère se cristalliser à gauche et autour de nous gens dont ils connaissent la détermination et la volonté de pouvoir. D’où les changements de dates de leurs manifestations pour se coller à notre appel pour le 5 Mai. Naturellement il ne s’agit pas pour eux de manifester avec nous quand bien même certains mauvais plaisants essaient de le faire croire. Ils manifesteront peut être ailleurs dans Paris et sur leurs propres mots d’ordre. Mais c’est l’aveu que ce changement de date contient qui est important.

http://www.jean-luc-melenchon.fr/2013/04/14/populiste-cest-celui-qui-le-dit-qui-y-est/

Anonyme a dit…

«Jean-Luc Mélenchon et le Front de Gauche ont pris unilatéralement l’initiative d’appeler à manifester le 5 mai pour une VIe République. Nous ne partageons ni cette façon de faire ni son objectif , mais blablabla»

http://npa2009.org/node/36647


Anonyme a dit…

« la forme c'est du fond qui remonte à la surface », disait Victor Hugo

WHAOUU

Manureva a dit…

No, d'accord, Mais SuperNo ? Hein ? Vous y avez pensé ?

Pfff. Amateurs.

seb le jaune a dit…

No... le film sur Hannah Arendt... vivement le retour de la pluie pour aller s'enfermer au cinéma!

Anonyme a dit…

Bah alors bande de sous putes a crack, vous publiez plus rien?

http://fritesbierepc.com/ce-que-le-gouvernement-cache-sur-lattentat-de-boston/

cadale!

Plekszy-Gladz (stagiaire anarcho-droitier) a dit…

Eh ben, Guillaume est quelque part entre Jordanie et Palestine, et Romain est amoureux donc improductif éditorialement parlant.

Et moi j'ai juste le droit de répondre au courrier. Toute autre initiative de ma part me vaudra un doigt de cassé (encore un autre)